Aller au contenu

Comment inciter un producteur à nous vendre son vin cher

La vérificatrice générale du Québec a dénoncé avant hier la politique d’achat des dirigeants de la SAQ qui ne vise pas à obtenir les meilleurs prix pour les vins.

«En 2014-2015, la SAQ a effectué cinq appels d’offres. Les besoins figurant dans l’appel d’offres sont déterminés non pas en fonction d’un prix départ chais, mais plutôt selon une fourchette de prix de détail que la SAQ a établie pour répondre aux besoins liés à la gestion par catégorie.»

«Si leur produit ne se classe pas dans cette fourchette de prix de détail, il sera refusé par la SAQ. En procédant ainsi, cette dernière annonce à l’avance le prix qu’elle veut payer.»

Mme Leclerc recommande donc à la direction de la société d’État «d’examiner périodiquement la politique d’achat et de mise en marché pour y inclure les meilleures pratiques en matière d’acquisition et mettre en place des moyens pour favoriser l’obtention des conditions d’achat les plus avantageuses

Pensez-vous que la direction de la société d’État a compris le message?
Bien non!
Dès le lendemain, la SAQ lance un appel d’offres et continue de faire ce que lui reproche Mme Guylaine Leclerc. Et en pire! Comme vous allez le voir.

Hier, la SAQ lance donc un appel d’offres pour 26 vins de repas de consommation courante.

Dont voici un exemple.
La SAQ veut un blanc d’Espagne. «UN (1) vin de repas blanc. Prix de détail suggéré: 13,00$ à 15,45$».
Elle fixe donc un prix minimum de 13 $. Ce que lui reprochait justement la vérificatrice générale de mettre un prix plancher.

De plus, la SAQ précise dans son appel d’offres un objectif de vente. Mais un objectif qui sera différent selon le prix. Le producteur devra en écouler pour 1 million de dollars s’il nous le vend au prix de détail de moins de 15 $; mais son objectif sera réduit à 750 000 $ et plus facile à atteindre s’il nous le vend de 15 $ à 15,45 $.

Et c’est le cas pour les 25 autres vins: la SAQ fixe un prix minimum et impose pour plusieurs des objectifs de vente moins élevés si le producteur nous le vend plus cher!

Quel message cela envoie-t-il au producteur?
Il a fortement intérêt à nous le vendre au prix désigné de 15 $ plutôt que 13 $. Parce que s’il n’atteint pas son objectif de vente son vin risque d’être retiré. Et retiré avec pénalité!

En effet, pour rendre le message encore plus clair, la direction de la SAQ publie aussi hier sa «Politique d’achat et de mise en marché». On y lit qu’un «produit courant peut être retiré de la SAQ s’il se classe dernier de sa catégorie ou de son segment de catégorie». On y mentionne qu’un «produit courant retiré du répertoire moins de deux (2) ans après sa date de commercialisation est sujet aux mesures particulières de retrait». Et la pénalité est salée : «le fournisseur de ce produit doit payer, pour les stocks non vendus, une pénalité de 25 % de leur prix d’achat

Mentionnons en terminant qu’il y a aujourd’hui 94 vins blancs d’Espagne dans la section des produits courants à la SAQ; dont 81 à plus de 15 $, mais seulement 13 à moins de 15 $.

Mentionnons aussi que l’Espagne est le pays qui vend ses vins les moins cher parmi les pays producteurs dans le monde.

Voir aussi